Technologies et droits

La reconnaissance faciale : avantages et inconvénients

Dans cet article, nous étudions les principales questions que soulève la reconnaissance facile. Pourquoi est-elle utilisée ? Comment fonctionne-t-elle ? Est-elle sûre ? Est-elle légale ? Quels sont ses avantages et ses inconvénients ?

by Nikolett Aszodi & Alice Norga

La technologie de la reconnaissance faciale est un sujet très controversé, provoquant de vifs débats dans le monde entier. D’un côté, cette technologie est vue comme étant très efficace : elle serait rapide et objective dans l’accomplissement de ses missions. D’un autre côté, on s’inquiète de ses imprécisions et biais qui pourraient entraîner des discriminations et porter atteinte à des droits fondamentaux, tels que notre liberté de manifestation.

La reconnaissance faciale : définition et fonctionnement

Il est bon de rappeler ce qu’est la reconnaissance faciale et tout ce qu’elle englobe. Le Bureau du commissaire à l’information du Royaume-Uni la définit comme le « processus par lequel une personne peut être identifiée ou reconnue à partir d’une image numérique ». À l’instar d’une carte d’identité, votre visage peut servir à prouver votre identité.

La reconnaissance faciale est utilisée pour servir deux objectifs : l’identification et la catégorisation. L’identification fait croise des enregistrements (en direct ou non) avec des enregistrements pré-existants et conservés sur une base de données. Quand de telles informations sont catégorisées, les effets de la reconnaissance faciale sont alors beaucoup plus étendus et conséquents. La technologie peut automatiquement filtrer les individus et les ranger dans des catégories selon des critères identifiables, tels que l’âge, le sexe, la taille voire même l’orientation sexuelle, et ce sans l’aide de la personne concernée.

L’algorithme classe les personnes dans des catégories en comparant les images avec des « représentations statistiques sur la moyenne de cette catégorie ». Si elle est mise en place à grande échelle, cette technologie peut entraîner une surveillance biométrique de masse. Car les caméras de télésurveillance et autres types de caméras, omniprésentes dans les espaces publics comme privés, peuvent être « améliorées » et intégrer la reconnaissance faciale. Cette technologie est déjà mise en place par les forces de sécurité et des acteurs privés dans de nombreux espaces, dont les écoles et gares ferroviaires.

Ce qui est très inquiétant, c’est que la pupart du temps, nos images sont transmises à des bases de données de reconnaissance faciale, sans que nous en soyons informés et sans notre consentement. Par exemple, il a été révélé récemment que Clearview AI, une entreprise technologique américaine, a abandonné trois milliards d’images de visages provenant de réseaux sociaux tels que Facebook, Youtube ou Twitter et a les vendues ces à des gouvernements et entreprises.

Comment la reconnaissance faciale affecte-t-elle notre vie de tous les jours ?

Si la reconnaissance faciale semble être sortie tout droit d’un film de science fiction, il fait discrètement son entrée dans les politiques de l’UE. Après avoir tester cette technologie à la gare Südkreuz de Berlin, depuis 2018, l’Allemagne prévoit actuellement de mettre en place des systèmes de surveillance biométrique de masse dans 134 autres gares et 14 aéroports, malgré l’opposition à un tel projet. La France compte elle aussi énormément sur la reconnaissance faciale, la volonté d’Emmanuel Macron étant de rattraper le retard pris sur la Chine et les États-Unis.

La police italienne a également commencé à déployé un Système de reconnaissance automatique des images (SARI), qui ne ciblera pas seulement quelques individus mais traitera les données biométriques de toutes les personnes présentes dans les espaces surveillés, afin d’identifier quelques personnes. Récemment, la ville de Belgrade en Serbie a installé des centaines de caméras de reconnaissance faciale, créant un système de surveillance permanente. À l’insu de la majorité de la population, la reconnaissance faciale se généralise de plus en plus en Europe. Mais de récents jugements rendus dans certains pays ont heureusement déclaré que les systèmes de reconnaissance faciale étaient illégaux.

Quels sont les avantages ?

Certains voient la reconnaissance faciale comme un moyen de rendre nos vies plus pratiques et confortables. Au lieu d’avoir à entrer un mot de passe sur nos téléphones, par exemple, ou d’avoir à montrer une pièce d’identité à l’aéroport, nos visages suffiraient à vérifier qui nous sommes. À Osaka, dans quatre gares différentes des systèmes de reconnaissance ont été mis en place pour gérer l’entrée des voyageurs, en scannant leurs visages sans avoir à utiliser de cartes d’identité. Le fait que les « passagers voyageant avec de grands bagages puissent simplement montrer leur visage sans avoir à chercher leurs billets » constitue un avantage, selon un responsable des transports dans le pays.

Alors que les processus internes d’authentification biométriques sont techniques, ils sont extrêmement simples et faciles d’utilisation pour les usagers. Placer un doigt sur un scanner et déverrouiller son compte en quelques secondes prend beaucoup moins de temps que de taper un long mot de passe aux multiples caractères spéciaux. Des mots de passe que de nombreux utilisateurs oublient fréquemment. Alors que les risques d’oublier vos propres données biométriques sont nulles.

De plus, la reconnaissance faciale aide à assurer la sécurité. Les données biométriques permettent de savoir précisément si une personne est en train d’accéder à un service ou de payer une transaction. Ceux qui défendent l’utilisation des données biométriques estiment que les mots de passe, PINs et autres informations d’identification peuvent être violées et piratées, ce qui permet aux fraudeurs d’accéder aux comptes reposant sur ces méthodes d’authentification. En revanche, il est beaucoup plus difficile pour une autre personne d’accéder à votre empreinte digitale… En ce qui concerne les forces de sécurité et la police, les défenseurs de la reconnaissance faciale estiment qu’elle permet à la police de tracer plus facilement les suspects.

Quels sont les inconvénients ?

La reconnaissance faciale ne respecte pas nos droits, et de plusieurs façons. Tout d’abord, cette technologie obtient de manière intrusive certaines de nos données les plus intimes et sensibles. Parce que nos données n’appartiennent qu’à nous seuls (en vertu du Règlement général relatif à la protection des données de l’UE, le RGPD), nous avons le droit de savoir si et quand nos données personnelles sont traitées et à quelles fins.


Deuxièmement, le fait de savoir que l’on peut être facilement identifiable peut nous entraîner à nous autocensurer, par crainte de conséquences négatives. Par exemple, les personnes qui savent qu’ils.elles seront identifiées et que leurs données seront conservées dans une base de données parce qu’elles ont participé à une manifestation, seront moins enclines à prendre part à des manifestations. Cela est particulièrement grave dans des situations où les gouvernements ont illégalement restreint le droit de manifester afin de contenir les critiques de la population.

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Troisièmement, les données biométriques comportent des risques de sécurité. Contrairement aux mots de passe, les données ne peuvent pas être modifiées. Si mon empreinte digitale « fuit », je ne peux pas la « réinitialisée » comme un passeport. Et votre visage pourrait être scanné à tout moment et partout, sans votre consentement, ce qui n’arrange rien. Cela veut dire que vos données biométriques pourraient être conservées dans différentes bases de données, dont les niveaux de sécurité sont inadaptés.

La reconnaissance faciale est aussi réputée pour fonctionner relativement bien sur les visages des hommes et femmes blancs, mais révèle des taux d’imprécisions élevés pour les personnes non blanches, surtout chez les femmes. Cela signifie que les personnes issues des minorités ethniques, qui tendent déjà à avoir un accès inégal aux services et aux infrastructures, rencontreront des obstacles supplémentaires quand les autorités utiliseront la reconnaissance faciale dans ces situations.

Non seulement cette technologie entraîne des discriminations contre les personnes non blanches, mais elle vise aussi de manière disproportionnées les individus marginalisés. En ce qui concerne la police et les forces de sécurité, la reconnaissance faciale est principalement utilisée dans des communautés qui font déjà l’objet d’un sur-contrôle policier. En Italie, par exemple, la base de données du système de reconnaissance faciale de la police contient deux millions d’images d’italiens, et sept millions d’images de réfugiés et migrant.e.s. Par conséquent, la façon dont cette technologie est utilisée risque de perpétuer la façon dont certains groupes sont déjà ciblés de manière disproportionnée.

Conclusion

La reconnaissance faciale peut sembler attractive du fait son potentiel à nous simplifier la vie et à accroître la sécurité publique. Mais elle risque davantage d’avoir des effets négatifs et de nous retirer plus facilement nos libertés, dont notre liberté de décision, ainsi que de renforcer les inégalités et les discriminations. Elle est de plus en plus populaire dans les différents gouvernements européens, et c’est pourquoi la loi doit s’adapter et réglementer son utilisation, qui ne peut pas se faire dans tous les domaines et contextes.

Liberties et la reconnaissance faciale

À Liberties, nous cherchons à faire interdire la surveillance de masse via la reconnaissance faciale. Il y a quelques mois, nous avons rejoint le mouvement ReclaimYourFace. Si vous pensez que la reconnaissance faciale n’a rien à faire dans nos espaces publics, signez la pétition ici.

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