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​Espagne : menotter les accusés dans les tribunaux affecte le processus judiciaire et va à l’encontre du principe de présomption d’innocence

« Suspects in restraints » est un projet européen qui étudie la façon dont les personnes suspectées d’infractions ou de crimes sont présentées devant un tribunal, les jurés , les médias et le grand public et en quoi les menotter affecte l'impartialité.

by Rights International Spain
Marco Verch (CC/Flickr) https://www.flickr.com/photos/30478819@N08/45174660185/

La présomption d’innocence est l’un des principes les plus élémentaires du système de protection des droits humains. Il constitue une garantie contre les condamnations injustes ainsi qu’un instrument permettant d’assurer que toute personne soit considérée comme étant innocente jusqu’à ce qu’il soit prouvé le contraire.

La police utilise les menottes de façon routinière, sans que cela soit justifié par le fait que la personne détenue soit dangereuse ou qu’elle représente un risque de fuite.

Rights International Spain (RIS), ONG membre du réseau Liberties, s’est vu confier la responsabilité de mener des enquêtes en Espagne, dans le cadre du projet européen « Suspects in restraints », et a pu dressé des conclusions très importantes.

Le rapport appelle à ce que soit transposée la Directive sur la présomption d’innocence dans le droit espagnol. Le cadre juridique devrait aussi être modifié afin de faire le lien entre la présomption d’innocence et l’usage de moyens de contrainte (privation de mouvement, dont port de menottes), et inclure des mesures en cas de non respect de la part des autorités de l’obligation de ne pas se référer aux suspects ou personnes accusées en les qualifiant de « coupables ».

Alors que l’utilisation de mesures de contrainte telles que les menottes est régie par le principe de proportionnalité, le rapport conclu que les forces de police utilisent les menottes de façon routinière, au lieu de s’appuyer sur une justification fondée pour en faire usage, sur la base du cas par cas, tel que requit par la directive citée plus haut. Les personnes détenues sont systématiquement menottées lors des transferts et c’est ainsi qu’ils arrivent au tribunal. C’est la première image que la presse et le public voit (une personne menottée), à la fois au tribunal mais aussi dans la presse.

Les procureurs ne sont pas d’accord, mais voir une personne accusée menottée peut sérieusement impacter la façon dont elle est perçue devant la cour.

Les juges et procureurs ont déclaré que les personnes détenues ne sont généralement pas menottées. Cependant, les avocats de la défense font remarqué que la pratique est courante. Quant à la perception de culpabilité associée à l’usage de telles mesures de privation de mouvement, les avis sont variés. Le rapport conclut que, pour les officiers et agents de police, voir des détenus menottés n’influence pas le processus juridique car ce sont des professionnels et qu’ils sont habitués à cela. Certains juges pensent pourtant que cela influence tout le monde, dont les juges eux-mêmes. C’est d’ailleurs un avis partagé par la plupart des avocats. Tous les professionnels s’accordent à dire que l’usage des menottes, et le fait de les voir utilisées, ont un impact négatif sur la société dans son ensemble. Il est donc important que les médias traitent cette question et parlent de l’impact que cet usage a sur le système judiciaire et sur le grand public, comme le souligne le rapport.

L’étude montre l’importance de la mise en scène et de la disposition des différents protagonistes. Certains professionnels estiment que l’accusé.e devrait être assis.e à côté de leur avocat, rendant la configuration aussi neutre que possible. De la même façon, les besoins en établissements judiciaires conçus de manière adéquate en vue d’éviter une trop grande exposition des personnes détenues menottées sont également cruciaux.

La façon dont la police communique avec les médias et le grand public pose aussi question. Pour certains professionnels, il s’agit de la source du problème, les journalistes recueillant des communiqués de presse publiés par le Ministère de l’intérieur ou des vidéos d’interventions policières émises par la police elle-même.

Une meilleure réglementation et une meilleure communication sont nécessaires.

La solution pourrait, en partie, consister à établir une réglementation plus précise vis-à-vis de l’usage de ces mesures de contrainte, en les interdisant et en imposant aux autorités de justifier toutes exceptions à la règle. Il est aussi nécessaire d’établir des voies de communication qui fonctionnent de manière plus fluide entre les agents impliqués dans les procédures pénales, et de promouvoir la formation dans le domaine de la présomption d’innocence pour les avocat.e.s, juges, procueur.e.s, agents de police et journalistes. De manière générale, des mécanismes de recours devraient être garantis en cas de violation du droit à la présomption d’innocence.

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